Ératosthène et la circonférence de la Terre : une révolution scientifique avec un bâton et un chameau

Voici comment Ératosthène a calculé la circonférence de la terre avec simplement un bâton et un chameau en 250 av JC

Il y a plus de deux millénaires, un savant grec nommé Ératosthène a réussi à calculer la circonférence de la Terre avec une précision étonnante sans même avoir recours à des instruments complexes.

Ce génie de l’Antiquité a démontré avec une méthode simple et ingénieuse que notre planète est bel et bien sphérique, défiant ainsi les idées reçues de l’époque.

Cet article vous plonge dans l’univers fascinant de ce pionnier de la géographie et vous explique en détail comment il a procédé pour mesurer la taille de notre globe terrestre.

Ératosthène, un savant aux multiples talents

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il convient de présenter brièvement le personnage central de notre histoire : Ératosthène de Cyrène.

Né en 276 av. J.-C. dans la colonie grecque de Cyrène, située dans l’actuelle Libye, Ératosthène a étudié à Alexandrie, centre culturel et scientifique de l’époque. Il a été très tôt remarqué pour son intelligence et sa curiosité, ce qui lui a permis d’occuper le poste très prestigieux de directeur de la Bibliothèque d’Alexandrie, la plus grande bibliothèque du monde antique. Ératosthène était un véritable polymathe, s’intéressant aussi bien aux mathématiques, à l’astronomie, à la géographie, à la philosophie qu’à la poésie.

Le point de départ : une observation surprenante

La grande aventure scientifique d’Ératosthène a commencé par une observation pour le moins étonnante.

  1. Un jour, alors qu’il lisait un papyrus, il apprit que, dans la ville de Syène (aujourd’hui Assouan), située à environ 800 kilomètres au sud d’Alexandrie, les rayons du soleil tombaient directement dans un puits profond à midi, le jour du solstice d’été. Ce phénomène étrange signifiait que, à ce moment précis, le soleil se trouvait exactement à la verticale de Syène.
  2. Or, Ératosthène avait remarqué qu’à Alexandrie, au même moment, le soleil ne se trouvait pas à la verticale et que les objets produisaient une ombre. Il en déduisit donc qu’il y avait une différence d’angle entre les deux villes.
  3. Pour expliquer cette différence, il fit l’hypothèse que la Terre était sphérique et que les rayons du soleil, parallèles entre eux, frappaient la surface terrestre en des points différents selon l’endroit où l’on se trouve.

Cette observation fut le déclic qui le poussa à entreprendre le calcul de la circonférence de la Terre.

Le protocole expérimental d’Ératosthène

Afin de mener à bien son entreprise, Ératosthène mit en place un protocole expérimental simple, mais ingénieux, nécessitant seulement un bâton et un chameau.

  1. Tout d’abord, il planta un bâton vertical dans le sol à Alexandrie, le jour du solstice d’été et à midi, lorsque le soleil était à son zénith. Il mesura ensuite l’ombre projetée par ce bâton et calcula l’angle qu’elle formait avec le sol. Cet angle était d’environ 7,2 degrés.
  2. En parallèle, il fit appel à un chameau pour mesurer la distance entre Syène et Alexandrie. Le chameau fut muni d’un système permettant de compter le nombre de pas qu’il effectuait. En connaissant la longueur de la foulée du chameau et le nombre de pas réalisés, il fut possible d’estimer la distance entre les deux villes, qui fut évaluée à environ 800 kilomètres.
  3. Grâce à ces deux informations, Ératosthène put calculer la circonférence de la Terre en utilisant la géométrie.

Le calcul de la circonférence de la Terre

Afin de déterminer la circonférence de la Terre, Ératosthène utilisa la méthode suivante :

  1. Il considéra que l’angle de 7,2 degrés correspondait à l’angle formé entre deux rayons du soleil frappant respectivement Alexandrie et Syène. Cet angle représentait la portion de circonférence terrestre entre les deux villes.
  2. Il divisa ensuite 360 degrés, correspondant à la totalité de la circonférence, par 7,2 degrés, pour obtenir le rapport entre la circonférence complète et la distance entre Alexandrie et Syène. Ce rapport était d’environ 50.
  3. Enfin, il multiplia la distance entre Alexandrie et Syène, soit 800 kilomètres, par ce rapport, pour obtenir la circonférence totale de la Terre : 800 km x 50 = 40 000 km.

Ce résultat est remarquable, car il est très proche de la valeur actuellement admise, qui est d’environ 40 075 km. Ératosthène avait donc réussi à estimer la taille de notre planète avec une précision étonnante, et ce, avec des moyens pourtant très limités.

Le calcul d’Ératosthène a constitué une véritable révolution scientifique, car il a permis de prouver que la Terre est bien sphérique et non pas plate, comme le pensaient certains à l’époque. De plus, cette découverte a ouvert la voie à de nombreux autres travaux en géographie, en astronomie et en navigation. Les progrès réalisés par la suite dans ces domaines doivent beaucoup à la perspicacité et à l’ingéniosité de ce savant grec, qui a su repousser les limites du savoir de son temps.

L’impact de la découverte d’Ératosthène sur les sciences et les civilisations

La méthode d’Ératosthène a eu un impact considérable sur les sciences et les civilisations, à la fois dans l’Antiquité et dans les siècles qui ont suivi :

  • Elle a permis de valider l’hypothèse d’une Terre sphérique, déjà émise par d’autres savants grecs tels que Pythagore et Parménide. Cette idée s’est ensuite progressivement répandue dans le monde antique et a influencé la conception de l’univers et la cosmologie.
  • Elle a contribué à l’essor de la géographie et de la cartographie, en offrant un cadre de référence pour mesurer les distances et représenter le monde. Les travaux d’Ératosthène ont notamment inspiré Ptolémée, un autre savant grec qui a réalisé un atlas du monde connu, la « Géographie », au IIe siècle de notre ère.
  • Enfin, cette découverte a eu des implications pratiques pour les navigateurs, les explorateurs et les commerçants, en leur fournissant des informations précieuses pour planifier leurs voyages et estimer les distances à parcourir. La connaissance de la taille de la Terre a ainsi favorisé les échanges et les contacts entre les différentes civilisations de l’Antiquité et du Moyen Âge.

Les limites et les critiques de la méthode d’Ératosthène

Malgré la justesse du résultat obtenu par Ératosthène, sa méthode n’était pas exempte de limitations et a fait l’objet de critiques :

  • L’une des principales sources d’incertitude résidait dans la mesure de la distance entre Alexandrie et Syène. Le recours au chameau pour estimer cette distance présentait des risques d’erreur, notamment en raison des variations de la longueur de la foulée de l’animal ou des imprécisions dans le comptage des pas. De plus, l’itinéraire emprunté par le chameau n’était peut-être pas une ligne droite, ce qui aurait pu fausser la mesure.
  • Le calcul de l’angle de 7,2 degrés reposait sur l’hypothèse que les rayons du soleil sont parallèles entre eux, ce qui est une approximation. En réalité, les rayons du soleil sont légèrement divergents, en raison de la taille finie de l’astre. Toutefois, cette divergence est très faible et n’affecte que peu la précision du résultat.
  • Enfin, certains critiques ont souligné que la méthode d’Ératosthène reposait sur un certain nombre d’hypothèses et de simplifications, telles que l’absence de relief entre Alexandrie et Syène ou l’uniformité de la sphéricité de la Terre. Il est vrai que notre planète n’est pas une sphère parfaite, mais plutôt un ellipsoïde légèrement aplati aux pôles. Néanmoins, ces imperfections n’invalident pas le principe de base de la méthode et la justesse de son résultat.

La découverte d’Ératosthène a marqué un tournant dans l’histoire des sciences et de la connaissance de notre monde. Sa méthode, bien que comportant certaines limites, a permis d’établir la taille de la Terre avec une précision remarquable et a ouvert la voie à de nombreux progrès dans différents domaines. Cet exploit démontre l’ingéniosité et la persévérance des savants de l’Antiquité, qui ont su dépasser les obstacles et les idées reçues pour repousser les frontières du savoir. L’héritage d’Ératosthène continue ainsi à inspirer les chercheurs et les explorateurs d’aujourd’hui, qui poursuivent l’étude de notre planète et de l’univers qui nous entoure.

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